19 mai 2017

MADAGASCAR, 1947

Raharimanana n’était pas né en 1947. En mars, Madagascar s’était insurgée contre la colonisation française. La répression dura deux ans. Sa mémoire demande des comptes. Il cherche à reconstituer ces années-là qui échappent aux mémoires, histoire réécrite par les vainqueurs, tue par les vaincus, pour oublier.
 
Derrière le maquillage lexical, il scrute l’agression requalifiée en protectorat : « comment faire croire que ce qui arrive à l’indigène n’est que pour son bien d’enfant irresponsable. » Être « civilisé » et non pas « colonisé ». Être « pacifié » et non pas « massacré ». L’indépendance continuera à faire référence au colonisateur qui aura « gracieusement offert la possibilité de cheminer seul dans ce monde hostile. »
La mémoire reste vivace mais sa transmission est condamnée à la légende et à la rumeur. Pendant longtemps seule l’armée française a écrit, seul l’oppresseur a donné sa version des faits. 89 000 morts ?
Obsession du gouvernement malgache de ne pas se couper des mannes de l’État français en évoquant les massacres coloniaux ou même les préjudices de la colonisation : ne pas farfouiller dans le passé pour ne pas altérer les « bonnes relations » avec la France, au mépris de la vérité historique. Les dirigeants, en prenant la place des colons ont repris subtilement leurs mots : le pays doit se « développer », prendre la marche de la « modernité ».


Ce beau texte évoque des événements rarement mentionnés, y compris cette année, soixante-dix ans après. Plus qu’une enquête rigoureuse, il s’agit d’une volonté personnelle, intime, de chercher à comprendre, par devoir, par nécessité, aidé par quelques souvenirs, courriers ou conversations. Une démarche forte, nécessaire et percutante.



MADAGASCAR, 1947
Raharimanana
Photos du fonds Charles Ravoajanahary
62 pages – 7 euros.
Éditions Vents d’Ailleurs – La Roque-d’Anthéron – mars 2007

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